J'aime écrire et dessiner, j'aime papoter pour ne rien dire souvent.
Mais là, j'ai besoin de te parler à toi. Mais de loin. Pour l'instant. C'est trop dur de reprendre le passé, et de revivre tout cela. Ca nous appartenait. Personne ne saura jamais ce que c'était.
Mais ça nous appartenait, à nous.
Quand je t'écris, j'ai l'impression de redevenir cette jeune fille de cette époque. J'ai l'impression de retrouver l'innocence qui m'emprisonnait.
Mais je ne suis plus cette petite fille qui avait tant besoin d'amour.
Je l'ai cet amour, je l'ai et je le chéri jour après jour, nuit après nuit... je ne peux m'en passer. Je ne veux m'en passer. Même pour retrouver ce qui n'est plus.
Mais j'aimerais tant retrouver cette complicité qui nous unissait. Cette amitié, devenue si spéciale par la suite, mais juste l'amitié qui nous liait. Je voudrais ça.
Parce que tu étais ce que je cherchais. La meilleure amie que tout le monde cherche. C'était ça. C'était l'idéal de l'amitié. L'amour, c'est autre chose.
J'avais besoin d'aimer, d'être aimée. Tu le sais, tu l'as toujours su.
Mais je ne me souviens pas. Je n'arrive pas à atteindre la poignée de la porte pour la tourner et entrer dans la pièce qui nous était dédiée. Tous ces souvenirs évaporés. Parce que trop mal de te
perdre.
Je resterai toujours pleine de regrets. Je n'y peux rien. Tu m'as manqué.
J'ai voulu t'oublier. Pour toujours. Ne plus jamais te voir, ni t'entendre, ni t'imaginer. Plus jamais.
Cependant, tu as toujours été omniprésente depuis le début. Tu as toujours été là, même absente.
Ma chambre bleu Yuki, le restera toujours.
Mon mot secret, tu es la seule à le connaître. C'était celui qui nous liait.
Et je l'utilise tous les jours.
Mon agenda Chipie, identique au tien, que je n'ai pas perdu dans le grenier... il est dans mon bureau. Je pourrais le relire.
Relire ce si beau poème.
Celui que tu m'as écris.
Celui qui me rend toujours nostalgique.
Je t'ai croisée une fois. A l'Espace Jaures.
Tu sortais.
J'entrais.
Mais te voir, juste un instant...
Tu parlais.
Je ne voulais pas te déranger.
J'étais pressée aussi.
Ca m'avait chamboulée.
Tu sais, Nicolas, c'est l'homme de ma vie. Toi, tu étais la femme... mais je ne m'en étais pas vraiment rendue compte. Je n'avais pas compris à cette époque ce que tu étais. Que les limites
brûlées auraient pu aisément être dépassées.
Aujourd'hui, je ne peux accepter que ton amitié. Car jamais, jamais, jamais je ne t'attraperai. Et surtout, parce qu'à présent, Il est là, Il compte trop pour moi, pour que je laisse le passé me
reprendre.
Il te haïra. Pas si nous sommes amies. Pas si tu ne m'attrapes pas. Pas, parce que je ne laisserai plus l'amour reprendre le dessus, parce que je ne veux plus souffrir de toi, l'insaisissable.
Pas, parce que je suis amoureuse de Lui.
Je suis peut-être devenue plus impitoyable. Dans mes sentiments.
Je veux protéger ce que j'ai.
Ce que j'ai construit.
Je me suis protégée, j'ai essayé, après M. Je ne voulais plus aimer.
C'est dur d'aimer.
D'être une amoureuse de l'amour.
De vouloir toujours aimer quelqu'un, pour qu'il soit heureux.
Un être spécial.
Il est cet être spécial.
Il prend soin de moi.
Je ne veux pas faire de mal.
A personne.
Je n'aime pas ça.
J'ai juste fait la part des choses, aujourd'hui.
Je me contredis toujours. Ca n'a pas changé. Pour ça, je suis toujours la même. Mais je sais ce que je veux. Et je ne peux obtenir tout à la fois. Il y'a toujours des sacrifices à faire.
Je ne veux pas le sacrifier.
Pas Lui.
Parce que le jour où il m'a dit "je t'aime", j'ai cru que j'allais pleurer. Parce que ce même jour, il attendait, depuis des semaines, que je lui dise, que je lui murmure ce je t'aime. Sur la
plage. Près de Lorient.
Parce que le jour où il est entré dans ma vie, j'ai su.
J'ai su que c'était Lui. Lui, et personne d'autre. Qui me rendrait heureuse.
J'ai grandi. J'ai changé. J'ai appris que mes sentiments ne sont pas toujours partagés. A mes dépends. A ma souffrance.
22 ans, bientôt. Ils sont loin nos 16 ans.
Et pourtant, ils me reviennent par moments.
Surtout ton rire. Eternel.
Tes yeux noirs, et ton sourire merveilleux.
Tes mains froides, et si longues.
Tu sais, je vais poursuivre ma vie auprès de Lui. Je vais partir avec Lui. A Nantes. Et nous achèterons, ou construirons, notre Maison Perdue. Je veux des enfants de Lui. Je veux passer le reste
de mes jours avec Lui.
Il est mon Idéal. Celui que j'ai longtemps cherché.
Trop de choses à dire. Trop de choses à passer sous silence.
Des choses que je ne peux qu'écrire.
Tu le sais, je suis maladroite à l'oral.
Tu m'as vu pleurer, un après midi dans ma chambre bleue Yuki. Je ne sais plus, je crois que je pleurais ma grand mère disparue.
J'en ai versé des larmes depuis. J'en ai versé, mais pas pendant longtemps. Pendant longtemps je suis restée asséchée. Et Il est arrivé et m'a aidée à faire sortir tout ce qui pourrissait en
moi.
Il m'a dit qu'il ne m'abandonnerait pas. Parce qu'il m'aime. Parce que je compte énormément pour lui.
Cette lettre pourrait ne jamais se terminer. Je voudrais continuer de t'écrire. Comme nous le faisions avant. Je ne l'ai plus refait après toi. Peut-être ai-je essayé, mais jamais je n'ai réussi
à refaire tout ça. Impossible de t'oublier.
J'aime t'écrire.
Je n'ai jamais eu de réserve avec toi. Mais ne t'étonnes pas, si aujourd'hui, j'en ai quand même un peu.
J'ai trop souffert d'aimer, ces dernières années.
A nos 16 ans.